Penser « gouvernance » pour les Européennes ?
Pour commencer ce nouvel article, je souhaiterais reprendre quelques lignes de celui sur le capitalisme.
Cette crise que d’aucuns qualifient déjà de « récession » nous amènera, si nous voulons en sortir par le haut, à reconsidérer et à intégrer le rôle de nouveaux acteurs comme forces de
propositions, complémentaires des fonctions de l’Etat. En effet, par les changements énormes qu’il y a eu dans les moyens de communication, notamment de l’Internet, avec comme l’une des
conséquences une mondialisation de l’information, la Démocratie dans sa dimension de Gouvernance est en pleine mutation.
Les citoyens et la société civile, représentée notamment par les associations mais aussi par les ONG et les Fondations, doivent et peuvent
contribuer à la résolution de cette crise, en particulier dans son volet social qui se profile à l’horizon. Il n’y a pas que des inconvénients, cela peut constituer pour nos sociétés un
formidable renouveau démocratique et les débats qui s’en suivront seront porteurs de changements dans la gouvernance même des États. Il y a là avec l’ensemble de ces nouveaux acteurs et avec
l’État, un grand débat d’idées où la place de la morale, de l’éthique dans les domaines politiques et économiques devra être discutée de façon approfondie et responsable.
L’objectif de la gouvernance est de se rapprocher de l’optimum politique et de garantir par là un exercice efficient et efficace de gouvernement. C’est se résoudre à une approche globale dans l’exercice du pouvoir qui passe par davantage de dialogue, la recherche du consensus et la prise en compte d’intérêts multiples. Cette approche intégrée nous apparaît donc, en période de crise, d’une grande actualité et utilité.
Le concept n’est pas seulement à usage national mais aussi international. La prise en compte des intérêts
multiples et la recherche du consensus peuvent être les lignes directrices d’une diplomatie moderne qui s’inscrirait dans un monde multipolaire. Dans cette logique, il apparaît nécessaire, par
exemple, de refonder les organisations internationales telles que les Nations Unis, le FMI ou la Banque Mondiale. L’ensemble de ces organisations datent de l’immédiat après deuxième guerre
mondiale et le monde a beaucoup changé depuis, notamment avec la fin des empires coloniaux, la fin de l’URSS et l’émergence de nouvelles puissances.
La prise en compte du nouveau visage, ou devrait-on dire « des » nouveaux visages du monde, incite à envisager une réforme démocratique des grandes institutions internationales. Un Conseil de Sécurité intégrant un pays du continent africain mais aussi l’Inde et le Brésil, puis la création d’un siège pour l’Union Européenne, ou encore la présidence des grandes institutions financières que sont la Banque Mondiale ou le FMI occupée par des représentants de pays non Européens ou ne venant pas des États-Unis d’Amérique, sont des éléments importants à prendre en considération si nous voulons mobiliser l’ensemble de la planète dans la résolution de cette crise mondiale.
La mobilisation d’un grand nombre de pays et de leurs citoyens pour relancer l’économie mondiale est aujourd’hui un impératif qui s’impose à tous si l’on veut résoudre au plus vite et de façon la plus équitable possible la crise économique, devenue sociale, que nous traversons depuis plusieurs mois. Cela est d’autant plus urgent que cette crise n’est pas la seule à laquelle nous devrons faire face dans les années à venir, car celle du climat ou de l’énergie sont elles aussi, d’ores et déjà, des défis majeurs à relever. Celle du climat ne peut évidemment être appréhendée qu’à l’échelle internationale, les problèmes de pollution et de catastrophes naturelles ne connaissent pas les frontières tracées par les États.
En ce qui concerne l’énergie, et en premier lieu le pétrole, même si le prix du baril est actuellement bas, une baisse de la demande des pays industrialisés et des
pays émergeants paraît aujourd’hui peu probable, surtout si nous voulons relancer l’économie par des politiques de grands travaux. C’est pourquoi il nous faut penser dès à présent à une envolée
prévisible du prix du baril ! Les conséquences géopolitiques seront importantes dans cette course aux énergies. Elles ne pourront être corrigées que dans la concertation, les réserves
n’étant pas extensibles au regard de la croissance exponentielle des besoins des économies.
La gouvernance n’est pas seulement applicable au niveau international mais aussi local.
En effet, la recherche du consensus par la prise en compte du plus grand nombre de partenaires dans la décision politique, prend tout son sens à l’échelle locale, dans les communes, et à
l’échelle régional, dans les départements. C’est là une chance pour voir apparaître une implication directe et pérenne des citoyens dans la vie de la cité et /ou de la région. Les
populations se sentiront de fait partie prenante de l’ensemble des processus qui débouchent sur les prises de décisions politiques ce qui peut, en période de crise, désamorcer bien des conflits
sociaux.
Nous pouvons également associer à cette pratique locale de la gouvernance, le monde de l’entreprise. En effet, des décisions concertées et expliquées à l’ensemble d’un atelier, d’une division ou d’une usine réduiraient les possibilités de conflits. Ce rapprochement des étages hiérarchiques permettrait une meilleure mobilisation de l’ensemble des employés dans un mouvement où chacun se sentirait, par le consensus, utile et essentiel pour la bonne marche de l’ensemble.
Cette gouvernance locale est un maillon important de la société civile européenne qui se rattache dans un premier temps à la gouvernance nationale au niveau de l’État et, dans un second temps, à celle européenne au niveau de Bruxelles. La participation du plus grand nombre de citoyens aux décisions publiques est assurée par le rapprochement qui s’opère de fait lorsque la décision est prise au plus près du citoyen et aussi lorsqu’elle est expliquée dans un objectif national et européen. C’est sans doute là, par l’implication participative, le moyen de mettre en place une citoyenneté européenne intégrant aussi bien le niveau local que national d’appartenance.
La mise en place des moyens techniques de réalisation de cette gouvernance fédérative apparaît aujourd’hui
comme aisée à réaliser avec les moyens de communications modernes dont nous disposons, en particulier grâce aux ressources offertes par l’Internet qui a largement démontré ses capacités de
mobilisation des nations lors des dernières élections américaines. Nombre de citoyens européens connaissent et utilisent les réseaux sociaux du net, la transition vers une gouvernance intégrant
cette logique serait simple à mettre en œuvre pour beaucoup de citoyens. Nos politiques utilisent déjà des sites comme facebook ou viadeo et leurs électeurs ont commencé à intégrer les
possibilités de concertation et de proposition de ces nouvelles plateformes publiques qui mettent le politique à portée de l’administré.
C’est là pour l’Union Européenne un chantier extraordinaire pour une modernisation de la démocratie laquelle pourrait représenter, une fois
le travail achevé, le véritable apport de l’Europe au débat démocratique mondial, une des composantes de ce « European way of life ! » qu’il nous faut encore trouver. Nous sommes
dans l’année des élections européennes et nous disposons, par le biais de la gouvernance, d’un sujet propice aux beaux et nobles débats politiques qui intéresseront sans doute les électeurs par
les perspectives qu’ils ouvrent et par la dynamique nouvelle qu’ils pourraient enclencher dans l’Union Européenne.
Olivier VEDRINE
Crise financière :
la BCE n'écarte pas le
risque
de crise systémique en Europe
La BCE s'inquiète en coulisse du montant pharamineux des créances toxiques encore détenues par les banques européennes...
La BCE s'inquiète en coulisse du montant pharamineux des créances toxiques encore détenues par les banques européennes. Le 'Daily Telegraph' publie ainsi ce matin des extraits d'une note confidentielle peu rassurante de la banque centrale européenne : "Les coûts budgétaires encourus par les Etats pour éponger les créances toxiques pourraient être très importants, tant en termes absolus que par rapport aux PIB des pays membres", relève le document, qui a été rédigé en prévision d'une réunion à huis-clos des ministres européens des Finances.
La BCE s'inquiète d'un risque de dérapage de la dette d'un certain nombre de pays et précise qu'une "réponse inadéquate" de leur part face à la crise "pourrait poser des risques au système bancaire européen dans son ensemble", surtout si des banques transfrontalières sont impliquées.
Les marchés expriment d'ailleurs dejà ces doutes : les écarts de rendement des emprunts d'Etat ont augmenté ces derniers mois entre les pays jugés solides (Allemagne, France...) et ceux dont les finances publiques sont fragilisées par la crise bancaire (Grande-Bretagne, Suisse, Grèce, Irlande, Belgique...). En effet, les déficits budgétaires explosent un peu partout : ils pourraient atteindre 12% du PIB en Irlande et environ 10% en Espagne et en Grande-Bretagne d'ici à 2010 !
En réaction, les investisseurs réclament donc une "prime", c'est-à-dire un taux d'intérêt plus élevé, pour détenir les emprunts de ces Etats fortement endettés. Les rumeurs, sans doute surfaites, de sortie de l'Euro de certains pays, circulent aussi depuis plusieurs mois sur les marchés...
La BCE s'appuie aussi dans sa note sur les récentes inquiétudes exprimées par le FMI : le fonds monétaire international a souligné la forte exposition des banques européennes aux actifs toxiques américains. Or, elle n'ont pour l'instant déprécié que pour 294 Mds$ de ces actifs contre 738 Mds$ pour les banques américaines... En outre, les banques de l'Union sont très exposées à l'Europe de l'Est (à hauteur de 1.600 Mds$), où les entreprises sont étranglées par la crise du crédit et la chute de l'activité.
Enfin, la dette des entreprises de l'Union est proportionnellement plus élevée (95% du PIB) qu'aux Etats-Unis (50% du PIB), ce qui augmente les risques de défaut de paiement en temps de crise.
En conclusion, la note de la banque centrale met en garde contre le "réel danger de course aux subventions entre les pays membres", qui menace de pousser certains pays au surendettement. "Il est essentiel que les aides des Etats n'atteignent pas un niveau auquel elles posent des problèmes de surendettement ou de financement" de ces pays...
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